Un Sang de Fer et de Nuits
Vael’rrash Thir’zahor vit le jour dans les hauteurs inhospitalières des Monts de Zir’Kaël, bastion austère où les vents mordaient la peau et où seuls les plus résilients survivaient. Sa lignée, issue des anciens maîtres de guerre de Brillendal, portait en elle un héritage de conquête et d’inflexibilité. Son père, le Duc Thar’Kaël Thir’zahor, était connu pour avoir écrasé la révolte des Exilés d’Orthranis, tandis que sa mère, Isilya Vareth, appartenait à une lignée de juges intransigeants dont les sentences étaient ciselées dans le marbre des cours royales.
Dès son plus jeune âge, Vael’rrash fut élevé comme un prédateur, non comme un héritier. On ne lui enseigna pas la clémence, mais l’art de briser les volontés. Dans les salles glacées du Bastion de Zhaëron, il apprit à manier l’épée comme un bourreau, à parler comme un tribun, et à punir sans remords.
À seize ans, son père l’envoya commander une garnison dans les terres désolées de Nakh’Var, où seuls les condamnés et les bannis survivaient. Ce fut là qu’il apprit la valeur du pouvoir brut, la manière dont la peur domptait les âmes et forgeait l’ordre. Il revint à Brillendal à vingt-deux ans, le regard durci, la voix affûtée, et l’ombre de la mort flottant derrière lui.
Lorsqu’Irkay 6 arriva, Brillendal se trouvait au bord du gouffre. Des factions rivales luttaient pour l’influence, les rues pullulaient de mercenaires au service de marchands corrompus, et les murmures d’insurrection s’intensifiaient dans les tavernes.
Vael’rrash Thir’zahor ne prit pas le temps de parlementer. La potence s’éleva avant même que les premiers cris ne s’éteignent.
Il imposa un règne de fer. Ceux qui remettaient en question son autorité étaient traqués sans pitié. Son regard acéré perçait les mensonges avant qu’ils ne naissent, et son épée, Nirkal, fut témoin de plus d’exécutions que de batailles.
On disait de lui qu’il ne souriait jamais, que son âme était scellée dans un hiver perpétuel. Pourtant, il ne gouvernait pas par cruauté, mais par nécessité. Pour lui, la faiblesse appelait la ruine, et seul un pouvoir absolu pouvait garantir la prospérité. Il fut l'un des esclavagistes les plus redoutés
Mais dans les ruelles sombres, les dissidents n’avaient pas disparu. Ils attendaient.
Les légendes racontent que Vael’rrash ne mourut pas d’une lame ennemie, ni d’un poison glissé dans son vin. On dit qu’un jour, il s’éloigna seul dans la nuit, drapé dans son manteau d’onyx, et qu’il marcha jusqu’à la potence qu’il avait érigée.
Là, sous l’ombre de son propre jugement, il prononça un dernier décret :
— « Un royaume fondé sur la peur ne peut survivre sans un monstre pour le nourrir. »
Et lorsque l’aube se leva sur Brillendal, Vael’rrash Thir’zahor avait disparu.
Certains prétendent l’avoir vu rôder dans les terres oubliées, un spectre noir veillant sur une justice qu’il ne pouvait abandonner. D’autres murmurent qu’il n’était jamais parti, que son ombre s’étend encore sur Brillendal, observant ceux qui osent défier l’ordre qu’il a instauré.
Car si la peur s’efface avec le temps, le nom de Vael’rrash Thir’zahor, lui, demeure.