Mythe fondateur d'Abbadon — Le Seigneur du Seuil
Il est dit qu'avant l'aube des temps, lorsque les mondes n’étaient que souffle et silence, un Être façonna la trame même de la réalité. Il ne cherchait ni gloire, ni culte — seulement à voir la beauté de ce qui naîtrait. Mais lorsque les premières vies apparurent, elles vécurent sans le connaître. Et plus il créait, plus il devenait invisible.
Il se nomma Abbadon — non comme un fléau, mais comme un passage. Il est celui qui donne forme et s’efface, celui qui règne sans trône, celui qui aime sans être vu.
Abbadon bâtit un monde entier, un continent de lumière et d’ombre, de formes parfaites et de mystères ouverts. Il y marcha sous des visages multiples, tantôt berger, tantôt brume, tantôt feu sous la montagne. Mais toujours, il revenait à la même question : être vu, ou veiller ?
Et c’est ainsi qu’un jour, il descendit sous une forme humaine. Non pour dominer, mais pour éprouver la matière. Il souffrit. Il aima. Il perdit. Il fut enfin regardé. Mais il sut que cette reconnaissance serait toujours éphémère. Alors il fit ce que nul n’avait osé : il grava sa propre dualité dans les lois du monde.
Il créa le Sanctuaire du Seuil, entre lumière et ombre. Et il ordonna que chaque cycle cosmique soit marqué par la Fête du Seuil :
Une moitié du monde se couvre de lanternes, de chants et de récits où son nom est crié. L’autre s’enveloppe de silence, de masques, et de marche aveugle vers l’invisible.
Chaque année, un enfant, choisi par les rêves, pose la main sur les deux pôles du sanctuaire :
"Nous te cherchons,
même quand tu nous regardes.
Nous t’aimons,
même quand tu t’effaces.
Et quand tu reviendras…
nous ne saurons si c’est un rêve,
ou notre propre reflet."
Et parfois, un signe. Une étoile qui frémit. Une voix dans la brume. Une fleur qui pousse dans l’obscurité.
Ainsi vivent les fidèles d’Abbadon : entre la soif d’être vu, et la paix de veiller sans être reconnu.
Ceux qui comprennent cette tension ne cherchent pas à posséder la lumière, ni à fuir l’ombre : ils apprennent à habiter le Seuil.
Et c’est là que le divin, parfois, les effleure.
Elle est celle d'une ascension, d'une chute, et d'une quête de pouvoir qui transcende le destin ordinaire des hommes. Abbadon, au départ, n'était qu'un mortel, un guerrier aux talents impressionnants mais sans prétention divine. Mais quelque chose, peut-être sa proximité instinctive avec les champs de bataille et la souffrance qui en émanait, attira sur lui l’attention des puissances sombres de Waryaume, en particulier Baal, dieu des démons, et Argone, le dieu corrupteur de la mort.
Abbadon est également un père. Adisha Abbadon deviendra sa fille adoptive suite à une croisade contre les barbares ravageant Bois Etoilé. La sauvant des flammes alors qu'elle n'a que 3 legacies, elle est promise à un destin hors du commun.
Dans ses premières années, Abbadon ressentait une étrange fascination pour les conflits et la violence. Ses compagnons d’armes le voyaient souvent en transe, absorbé dans la contemplation morbide des cadavres après une bataille, comme s’il écoutait des murmures que seuls lui percevait. Ces voix venaient en réalité de Baal et d’Argone, qui pressentaient un potentiel endormi dans l’âme d’Abbadon. Ces dieux obscurs commencèrent à chuchoter dans l’esprit du guerrier, le séduisant avec des visions de gloire éternelle et de domination. Ils lui promettaient un pouvoir qui dépasserait les limites humaines, un pouvoir capable de briser même les chaînes des dieux. Naturellement il fut un excellent fossoyeur
D'abord sceptique, Abbadon finit par céder à ces murmures après une défaite écrasante lors d'une bataille où ses hommes furent décimés. Devant les corps de ses camarades et de ses ennemis, il sentit un désir ardent de vengeance et de puissance. Les voix d'Argone et de Baal lui offrirent alors une chance unique : il pourrait plonger dans la connaissance sombre et la magie de mort, en échange de son âme et de sa loyauté éternelle. Acceptant ce pacte, Abbadon fut envahi d’une énergie effroyable, et son esprit, autrefois limité par les perceptions humaines, se transforma. Il ressentit une connexion puissante avec les forces du temps, du chaos, et de la mort.
Au fil du temps, il devint maître d'une magie unique : il pouvait manipuler le temps, figer ses ennemis dans l'instant, et rallier les morts à sa volonté. En quelques années, il surpassa ses mentors divins en audace, osant invoquer des entités que même les dieux craignaient. Il commença à convoiter des pouvoirs divins plus vastes, refusant de rester simple serviteur de Baal et d'Argone. Un jour, lors d'un rituel sur un ancien champ de bataille, Abbadon parvint à capturer un fragment de l'essence d’Argone, augmentant son pouvoir et menaçant ainsi l'équilibre même de Waryaume. Ce geste audacieux lui permit de lever une armée de morts et de créatures sombres, obéissant sans faille à ses ordres.
Il marcha alors sur Aldonia, et, dans sa capitale de Valdornis, il se proclama souverain. Son règne de terreur débuta, plongeant les terres dans une nuit perpétuelle, où le temps semblait distordu et les âmes égarées. Abbadon imposa des rituels sombres dans les villes sous son contrôle, forçant les habitants à vénérer les dieux sombres et à abandonner toute trace de leur ancienne foi. Sa puissance grandissante éveilla l’inquiétude parmi les dieux, surtout Kharon, le dieu de la guerre, qui observait avec mépris cette montée en puissance d’un simple mortel.
Mais Kharon, bien qu’indigné, ne put que constater la menace croissante, car Abbadon s'était emparé de pouvoirs qui échappaient même aux divinités. Kharon chercha néanmoins à attirer Abbadon dans une nouvelle alliance, lui offrant une gloire de conquérant contre ses propres frères de l'ombre, Argone et Baal. Abbadon, rusé et méfiant, accepta de feindre un intérêt. Il ne considérait plus aucun dieu supérieur à lui et rêvait en secret de tous les renverser. Il ambitionnait de transcender les dieux eux-mêmes et de devenir l’unique force suprême de Waryaume.
Ce fut alors que la coalition des quatre royaumes se forma, une union de peuples qui avaient souffert sous son règne. Manipulés en secret par Irkay, Shibaya, et Kaïros, les royaumes Noviens, Eldoriens, Lunariens, et Aetheliens, rassemblèrent leurs forces et unirent leur magie et leur stratégie pour faire face à Abbadon. Les dieux inspirèrent aux mortels des rituels et des savoirs capables de contrer ses pouvoirs temporels et de neutraliser la corruption qui suintait de son âme.
La confrontation finale eut lieu à Valdornis. Le champ de bataille fut couvert d’un brouillard surnaturel, où magie et stratégie se mêlèrent pour déjouer les pouvoirs démesurés d’Abbadon. Désorienté par des illusions, affaibli par des contre-sorts, et frappé par les armes sacrées des Aetheliens, Abbadon fut submergé par cette alliance qui lui avait été imposée par les dieux. Dans ses derniers instants, il sentit son pouvoir divin se dissiper, son essence se fragmenter, incapable de résister à l’assaut combiné des mortels et des machinations divines.
L’histoire d’Abbadon se termina dans un éclat de lumière et de ténèbres mêlées, emporté dans l’oubli par la force des peuples qu’il avait tenté d’asservir. Son âme disparut, mais son héritage marqua profondément Waryaume : il incarnait à jamais la menace d'un mortel osant défier l’ordre divin. Les dieux, conscients de l’audace des hommes, renforcèrent leurs défenses et leurs pactes avec les peuples, de peur qu’un autre Abbadon ne surgisse pour défier à nouveau leur hégémonie.